Chapitre 2

Les actions pour le climat et leurs suites judiciaires et politiques

Entre 2018 et 2023, un nombre important d’actions de désobéissance civile ont été menées, occasionnant plus d’une centaine de décisions judiciaires et des procédures qui se poursuivent encore en cet automne 2023. Quels étaient les buts de ces actions, les intentions et l’état d’esprit des militants ? Quelles stratégies les autorités judiciaires ont-elles adoptées, pour quel résultat ? Comment le pouvoir politique et l’opinion publique réagissent-ils et elles ? Que laisse présager pour l’avenir la mobilisation des collectifs militants ? Telles sont les questions que nous abordons dans ce chapitre, avec les contributions des interlocuteurs-trices que nous avons interviewé-es :  deux jeunes activistes du climat Théo Savary et Cynthia Illi, deux avocat-es, Irène Wettstein et Raphaël Mahaim, ainsi que la Professeure Camille Perrier Depeursinge, Centre de droit pénal de la Faculté de droit, Université de Lausanne.

*

Entre 2018 et 2023, un nombre important d’actions de désobéissance civile ont été menées, occasionnant plus d’une centaine de décisions judiciaires et des procédures qui se poursuivent encore en cet automne 2023. Quels étaient les buts de ces actions, les intentions et l’état d’esprit des militants ? Quelles stratégies les autorités judiciaires ont-elles adoptées, pour quel résultat ? Comment le pouvoir politique et l’opinion publique réagissent-ils et elles ? Que laisse présager pour l’avenir la mobilisation des collectifs militants ? Telles sont les questions que nous abordons dans ce chapitre, avec les contributions des interlocuteurs-trices que nous avons interviewé-es :  deux jeunes activistes du climat Théo Savary et Cynthia Illi, deux avocat-es, Irène Wettstein et Raphaël Mahaim, ainsi que la Professeure Camille Perrier Depeursinge, Centre de droit pénal de la Faculté de droit, Université de Lausanne.

Impossible de présenter ici toutes les actions en justice et de désobéissance civile qui se sont déroulées ces dernières années tant elles sont nombreuses et diversifiées. Nous avons déjà évoqué dans les chapitres précédents « Les Aînées pour la protection du climat » et la « ZAD du Mormont ». Place maintenant, en vrac, aux « joueurs de tennis » dans le hall de Crédit Suisse ; aux « Mains rouges » maculant la façade du même Crédit suisse à Genève ; au « Block Friday » à Fribourg pour contester l’appel à la consommation du Black Friday ; à la détérioration de terrains de golf, de panneaux publicitaires ou de machines de chantier ; à l’occupation de ponts ou blocage de routes par « extinction rébellion (XR) » ou Renovate Switzerland.

A noter que tous ces collectifs ou mouvements visent des cibles certes différentes mais complémentaires, toutes en lien avec le climat : l’eau, la terre agricole, la biodiversité, la construction et l’isolation des bâtiments, les énergies fossiles, la finance, le trafic, etc. Parés de noms évocateurs tels que les « grondements de la terre », « Friday for Future », ou « Last Generation », ils sont en passe de constituer un réseau international de militants, tous connectés à la problématique globale de la sauvegarde des conditions de vie sur la terre.

Si le but est le même, les moyens diffèrent. L’observateur, le citoyen et le juge, sont confrontés à un problème de limites : qu’est-ce qui est tolérable et qu’est-ce qui ne l’est pas ? Certes, la violence ou la non-violence sont des critères faciles à concevoir, mais pas forcément simples à appliquer. La désobéissance civile, elle, a fait l’objet de plusieurs définitions, dont celle d’Amnesty International en 2019 : « La désobéissance civile marque le conflit entre la loi et certains droits tels que le droit à un environnement sain, au respect de son intégrité, ou la liberté d’expression ». « La dimension légale est un principe constitutif de la désobéissance civile ».[1]

Ainsi, des dizaines d’actions réalisées jusqu’ici, certaines (comme la partie de tennis improvisée au Crédit suisse ou la manifestation contre le « Black Friday » dans un centre commercial à Fribourg) sont considérées comme pertinentes et efficaces (ce qui n’a pas empêché la justice, dans un premier temps, de prononcer des peines sévères). D’autres, comme la détérioration de panneaux publicitaires ou de machines de chantier, ou comme l’appel lancé par des jeunes à boycotter l’armée (on y reviendra dans le prochain chapitre) ont fait l’objet de poursuites disproportionnées (dont des incarcérations provisoires) et de jugements injustifiables.

Le public se fait en général une représentation des activistes qui ne correspond pas à la réalité. Ils ne sont en effet pas tous des jeunes marginalisés, réfractaires à l’ordre et hostiles aux institutions. Certain.es d’entre elles et eux siègent dans des parlements cantonaux ou municipaux, où ils ont été élus, parfois après les premières manifestations et les premiers procès.

Notre interlocuteur, l’avocat Raphaël Mahaim,[2] a une vision nuancée.

Il ne faut pas généraliser. Il y en a qui sont dégoûtés de l’action politique, parce qu’ils pensent que ça n’amène à rien. Mais d’autres ont des engagements à plusieurs niveaux dans des associations ou des mouvements et leur implication est remarquable. Malheureusement, ces engagements ont été fortement freinés par la pandémie. Il y a eu tout cela en même temps. C’est une période de mobilisation intense. Et fascinante. Et les mouvements ont explosé à une vitesse extraordinaire. Comme si ça couvait depuis des années.

*

La réponse de l’autorité :

Les forces de l’ordre

Dans certains cas, les forces de l’ordre interviennent massivement, voire brutalement, comme ce fut le cas en France ou en Allemagne, et, dans une certaine mesure lors de l’évacuation de la ZAD du Mormont. Elles peuvent aussi recourir à des méthodes plus perfides, comme en témoigne le témoignage de Théo.[3] 

La répression s’est faite de différentes manières et elle peut être ressentie différemment. Des amis qui ont eu affaire à la police à Lausanne, après l’évacuation [de la ZAD] l’ont très mal ressenti. Certains ont fait des crises de panique quand la police s’est faite menaçante. Dans d’autres manifestations pacifiques, comme celles que nous faisons une fois par mois à vélo, c’est généralement en fin de manifestation que la police se manifeste et tente d’encercler et d’emmener au poste une ou deux personnes, les accusant d’être les meneuses. C’est quelque chose d’assez stressant parce que la masse des manifestants a passé et que tous les autres sont partis. « Toi tu viens avec nous, toi aussi, et aussi toi ». Cela montre bien que si vous en faites trop, si vous organisez trop de manifs, c’est vous qu’on viendra chercher, c’est vous qu’on emmènera au commissariat et c’est vous qui allez payer pour toute la manifestation, vu qu’il n’y a pas d’organisateur.trice officiel.le. Les choses peuvent se passer ainsi même dans des grandes manifestations autorisées avec 10’000 personnes. On l’a vécu dans l’une d’elle quand deux personnes en civil juste derrière nous, avec des badges « grève du climat » se sont jetés sur un participant et l’ont sorti de la foule. Le temps qu’on comprenne qu’il s’agissait en fait de policiers infiltrés, on a vu une quinzaine de policiers descendre d’une rue parallèle, encercler ce manifestant et l’emmener au commissariat. Je connais cette personne et je suis sûr qu’elle n’a rien fait d’illégal pendant la manifestation. Des scènes comme ça, c’est assez paniquant. Pour moi, c’est clairement de l’intimidation.

Pourtant, selon les juristes, il s’avère qu’encercler les manifestants et ne les laisser sortir qu’à la condition qu’ils donnent leur identité est une pratique répandue en Suisse, mais contraire aux standards du droit international. Il en va de même pour l’obligation de demander une autorisation pour manifester, ce qui constitue un acte dissuasif contraire au droit international, de même que de tenir les organisateurs de manifestations pour responsables d’éventuelles déprédations. C’est aussi ce que dit le témoignage de Théo :

Lors du blocage d’un pont à Zurich avec XR, en l’espace de vingt minutes nous nous sommes retrouvés avec 14 fourgons de police de chaque côté, 7 blindés et environ 150 policiers, pour 200 personnes manifestement non-violentes. Ce qui m’a choqué dans cette affaire, c’est qu’ils nous ont promis que si on quittait le lieu (on a quitté le pont après 2 heures) ils allaient effacer nos données. Mais ils ont prétendu avoir juste besoin de nos noms et prénoms pour vérifier qu’on n’avait rien commis de grave. Bien plus tard, nous avons reçu une convocation à la police. Après tout ce temps, j’étais confiant dans la promesse de supprimer nos données et j’y suis allé. Or nous avons tous reçu des amendes, entre 1000 et 2000 francs ! Selon la police, ce n’était pas une amende, mais des frais de justice. De plus, ils ont refusé notre demande, vu que nous avions agi ensemble, de joindre les causes des personnes convoquées. Les policiers ont prétendu qu’il n’y avait pas de base légale pour infliger une seule grosse amende ! Je ne peux pas m’empêcher de voir là une espèce d’alliance entre la police et le pouvoir judiciaire pour nous décourager de refaire un blocage.

La police joue évidemment aussi un rôle dans l’instruction du Ministère public. Les procès ont souvent mis en évidence des entorses au règlement qu’elle avait commises, par exemple pour une fouille à nu jugée illicite, de même que pour le prélèvement systématique d’ADN dans les données signalétiques, ou pour des identifications aléatoires de manifestants, sur la base de captures d’écran de téléphones portables, ou encore pour des ordonnances pénales rédigées en termes généraux, sans tenir compte du rôle joué  par la personne. Toutes ces irrégularités ont conduit des tribunaux à dénoncer un manque de préparation de l’accusation par le Ministère public et à acquitter partiellement des activistes. 

La police joue évidemment aussi un rôle dans l’instruction du Ministère public. Les procès ont souvent mis en évidence des entorses au règlement qu’elle avait commises, par exemple pour une fouille à nu jugée illicite, de même que pour le prélèvement systématique d’ADN dans les données signalétiques, ou pour des identifications aléatoires de manifestants, sur la base de captures d’écran de téléphones portables, ou encore pour des ordonnances pénales rédigées en termes généraux, sans tenir compte du rôle joué  par la personne. Toutes ces irrégularités ont conduit des tribunaux à dénoncer un manque de préparation de l’accusation par le Ministère public et à acquitter partiellement des activistes. 

*

Les flottements de la justice

Une récapitulation de tous les procès qui ont déjà eu lieu ou de toutes les procédures encore en cours est mission impossible ! Une des raisons réside notamment dans le refus de la justice de traiter collectivement la cause des participants à une même action. Les dossiers des prévenus sont donc traités séparément, sur la base d’une instruction conduite au cas par cas. Le pouvoir judiciaire justifie cette manière de procéder par des raison juridiques et organisationnelles. Il s‘agit selon elle d’évaluer la situation de chaque individu en fonction de ses caractéristiques personnelles, de ses antécédents ou de son degré d’engagement dans l’action. Cette situation représente un gros préjudice pour les militant.es qui souhaitaient faire des tribunaux les porte-parole involontaires de leurs revendications. Par exemple, les 200 bloqueurs d’un pont à Lausanne, au lieu d’un grand procès unique leur offrant une tribune politique hors norme et à retentissement international, eurent droit à 32 procès s’étirant entre septembre 2021 et mai 2022 !

Cette procédure a conduit à produire une sorte de patchwork de décisions disparates, sans cesse remises en question par des recours « croisés » quasi automatiques, tantôt déposés par le Ministère public pour des jugements trop cléments ou pour des ordonnances de condamnation déclarées non conformes, tantôt par les inculpé.es eux-mêmes pour des peines trop lourdes. Par exemple, les militants qui avaient organisé la partie de tennis dans le hall du Crédit suisse ont d’abord été acquittés en première instance, puis condamnés sur recours du procureur par le Tribunal cantonal, puis ensuite par le Tribunal fédéral. Ils sont aujourd’hui en attente d’une audience devant la CEDH. De ce fait, pour une action organisée en 2018, le jugement n’est toujours pas tombé. Le temps long des procédures risque ainsi d’égaliser le temps long de la politique, alors que l’urgence des mesures à prendre est au centre de tous les débats !

Ce qui frappe donc dans le processus judiciaire, c’est l’impression de flottement qui s’en dégage. Selon les observateurs qui ont suivi les procès, les pratiques sont très variables d’un canton à l’autre : un blocage de route peut constituer une infraction différente à Zurich ou à Lausanne ce qui aura des répercussions différentes sur les condamnations. Sous le titre « Terroristes ou martyrs climatiques, l’énigme irrésolue des écologistes bloqueurs de routes », Boris Busslinger [4] rapporte que deux activistes interpellées à Zurich en 2021 ont été acquittées par le Tribunal cantonal, sur recours du Ministère public, conformément au jugement du Tribunal d’arrondissement. « Une singularité de plus, écrit-il, dans un paysage imprévisible où les jugements se suivent sans se ressembler, parfois à contre-courant des couleurs politiques  […].  Ce même mardi, ajoute-t-il, la même instance, présidée par un juge de droite nationaliste, surprenait tout le monde en vilipendant les forces de l’ordre pour avoir enfermé les accusées pendant deux jours alors qu’elles n’avaient perturbé le trafic que pendant 5 minutes ».  « Les manifestations en lien avec le climat conclut-il, donnent lieu à une polyphonie d’’arguments. Il règne un certain flou, et si le code pénal [fédéral], est unifié, son application varie beaucoup d’un canton à l’autre ».

Dans le même article, le journaliste du Temps rappelle qu’en 2022, un juge avait acquitté par deux fois des activistes du climat (et promettait de continuer à la faire) déclenchant les grondements de la justice, et, du même coup, la destitution du juge, demandée par le Ministères public.

Les procédures peuvent donc varier d’un tribunal à l’autres : certains juges acceptent d’entendre le témoignage des scientifiques, alors que d’autres s’y opposent, au motif que le problème du climat est connu de tout le monde et que les experts n’apporteront pas d’arguments nouveaux. Des divergences plus graves apparaissent aussi sur les éléments qui fondent la décision. Ainsi, le militant qui avait peint des mains rouges sur le mur du Crédit Suisse a été balloté d’un tribunal d’arrondissement au cantonal puis au fédéral et retour. Le Tribunal fédéral avait déjà annulé l’acquittement obtenu en deuxième instance, puis, au deuxième passage a annulé également la notion de « mobile honorable » qui aurait permis d’atténuer la peine.  Pourtant, pour la première fois en juillet 2023, la plus haute cour du pays a reconnu que l’action du gouvernement suisse n’est pas à la hauteur de l’accord de Paris. « Il est difficile de savoir comment la jurisprudence évoluera » conclut l’avocate du militant. « L’imminence du danger sera peut-être un jour reconnue dans la douleur ».[5]

Il convient de relever que le retentissement des procès, mettant face à face des juges foncièrement attachés à la loi et des jeunes très remontés, entourés d’une volée d’avocats bénévoles, peut donner l’impression d’une mise en scène visant à faire vaciller la magistrature. « Je ne le perçois pas du tout comme ça », proteste une des avocates, notre interlocutrice Me Irène Wettstein[6].

C’était extrêmement sérieux. Nous respectons la justice et nous prenons très au sérieux sa responsabilité. Nous préparons minutieusement le dossier et chacun fait son travail avec le même sérieux. Le procureur aussi. La preuve que ça fonctionne, c’est que l’acquittement prononcé en première instance [des joueurs de tennis] a été annulé par le Tribunal fédéral » (…) Mais j’admets qu’il peut y avoir un flottement et que les juges peuvent se sentir interpellés. Tout ce qui se passe nous concerne nous aussi en tant que personnes.  Ce procès fait plutôt penser à David contre Goliath : des jeunes non-violents se déguisent pour aller jouer une partie de tennis et en face, on a une justice qui leur tombe dessus et qui les condamne, sans saisir l’enjeu et sans reconnaître que ce sont des lanceurs d’alerte et qu’ils ont un message à faire passer.

Pour sa part, Raphaël Mahaim, autre avocat des « joueurs de tennis », constate lui aussi les flottements de la justice et ses incertitudes :

C’est vrai que le débat juridique est un peu chancelant : on sent de l’ambivalence, mais c’est pour une raison très simple, c’est que c’est vraiment très discutable de condamner ces gens. On sent très bien qu’il y a un champ de tension entre l’obligation de sanctionner et l’acquittement. La CEDH a rendu ce printemps un premier arrêt en matière climatique : elle a acquitté un militant qui s’était enchaîné au portail d’une mine d’argent et de minéraux précieux, en Roumanie, bloquant l’accès à la mine. Les forces de l’ordre étaient intervenues, mais la Cour a estimé qu’il faisait usage de sa liberté d’expression. Si la jurisprudence suit cette ligne pour nos affaires, une foule de cas similaires en profiteront. En fait, on navigue sur cette ligne de crête où on voit bien qu’avec la répression pénale il y a quelque chose qui ne joue pas.

Clémence Demay, avocate, partage cette impression d’incertitude, mais elle l’explique par l’évolution du regard porté sur les situations de désobéissance : au départ, pour les premières affaires, la justice semblait animée de la conviction qu’il fallait se montrer ferme. Mais les normes peuvent bouger et nécessiter des interprétations : « Et aujourd’hui, la pratique évolue. Comme un certain nombre de cas ont atteint les échelons supérieurs, notamment au TF, un accroissement des connaissances est en cours ».[7]

Bien qu’elle reconnaisse qu’en effet les juges doivent réinterpréter le droit et que le Tribunal fédéral « n’a rien comme jurisprudence sur l’état de nécessité » [8], notre interlocutrice la professeure Camille Perrier Depeursinge[9] se montre plus sévère :

Ce n’est pas la personne [du juge] qui compte, mais le message que la justice fait passer à travers sa personne ; c’est une représentation hiératique de la justice. « La loi c’est la loi ! ». Je pense que le procureur [celui qui a mené l’enquête sur les « joueurs de tennis »] y croit profondément, il est hyper-légaliste. Après, je pense qu’il devait pratiquer différemment, parce qu’il y avait toute la latitude qu’il fallait pour renoncer à sanctionner ou pour donner des sanctions à un franc symbolique. Je pense qu’il y a une peur de l’arrière garde qui voit que le monde change et qui ne veut pas que ça change : elle veut que la fête continue car c’est bien d’avoir de la croissance pour les emplois…

Clémence Demay, avocate, partage cette impression d’incertitude, mais elle l’explique par l’évolution du regard porté sur les situations de désobéissance : au départ, pour les premières affaires, la justice semblait animée de la conviction qu’il fallait se montrer ferme. Mais les normes peuvent bouger et nécessiter des interprétations : « Et aujourd’hui, la pratique évolue. Comme un certain nombre de cas ont atteint les échelons supérieurs, notamment au TF, un accroissement des connaissances est en cours ».[7]

Bien qu’elle reconnaisse qu’en effet les juges doivent réinterpréter le droit et que le Tribunal fédéral « n’a rien comme jurisprudence sur l’état de nécessité » [8], notre interlocutrice la professeure Camille Perrier Depeursinge[9] se montre plus sévère :

*

L’attente des activistes vis à vis de la justice

Comment les activistes, les militants et les collectifs de désobéissance civile appréhendent-ils et elles la justice ? S’attendent-ils et elles à être sanctionné.es ? Ont-ils et elles peur de la sentence, voire de la prison ? Espèrent-ils et elles, au contraire, l’affronter fièrement pour en faire une caisse de résonnance ?  Par exemple, après le réquisitoire du procureur lors de son procès pour sa participation à un sit-in aux Retraites populaires à Lausanne, une jeune militante, face au juge, a déclaré avec aplomb : « S’ils vous faut punir, alors punissez. Car nous préférons mille fois la sanction d’aujourd’hui au jugement des générations futures pour notre inaction » !

Nous avons demandé à nos interloctueurs.trices si tous les militant.es réagissent de la même manière. L’avocat Raphaël Mahaim n’est pas étonné par ce type de réponses :

Certains activistes arborent fièrement le statut de militants pour le climat et d’autres sa battent pour un acquittement. Les deux attitudes sont respectables. Elles poursuivent peut-être un cheminement intellectuel différent. Certains disent « je dois être acquitté parce que ce que je fais est une cause noble », et d’autres disent qu’ils ont décidé de casser les codes, de franchir une ligne rouge et qu’ils assument et en sont fiers. Les deux existent et ça pose la question de la relation à la sanction pénale. Elle est voulue parce qu’on cherchait à transgresser et qu’on s’accommode.

Ce n’est pas ce que dit Théo :

Pour nous, les 200 personnes concernées [par le blocage à Zurich] mille francs c’est une grosse somme. Beaucoup sont dans une situation financière difficile. Nous aurons de la peine à ne pas passer au judiciaire parce que nous sommes 200 personnes en sursis. Si je refais quelque chose ces deux prochaines années j’aurai un casier judiciaire.  C’est un obstacle pour nos projets futurs et ça fait peur à tout le monde.

Plongés dans le monde diversifié des acteurs des tribunaux : juges, procureurs, avocats, témoins ou scientifiques, les jeunes semblent faire preuve d’une certaine clairvoyance dans la perception des rôles de chacun. S’ils sont reconnaissants envers l’équipe des avocat-es bénévoles de les avoir bien défendus lors des premiers procès, ils ont compris ensuite que leurs défenseur-euses voulaient s’engager dans des causes plus larges dans le domaine économique en fondant l’association « Avocat.es pour le climat ». « Pour eux, les tribunaux peuvent être un lieu où l’on réforme le droit » remarque un prévenu. « Pour nous [les joueurs de tennis], ce genre d’action vise moins à changer le droit qu’à mettre en évidence une problématique qui était largement ignorée avant notre action : le rôle de la place financière dans le changement climatique ». C’est une façon d’exprimer leur déception que de constater que les causes pour lesquelles ils se mobilisent n’occupent pratiquement aucune place dans les tribunaux. Il y est question d’« entraves aux services d’intérêt général », d’« empêchement d’accomplir un acte officiel », de « contravention à la loi sur les contraventions », de refus de se soumettre aux ordres de l’autorité, de déprédations contre des biens public ou privés. Mais rien sur le climat, sauf pour affirmer, comme le fait le Tribunal fédéral, qu’il n’y a pas de danger imminent. L’« état de nécessité » n’est pratiquement jamais retenu, les « mobiles honorables » donnent lieu à des interprétations  divergentes, et la liberté d’expression et de réunion est rarement invoquée.

Pour les militant.es, il semble que la seule manière d’échapper au piège du juridisme étroit qui caractérise les jugements consiste à dénoncer à chaque fois les crimes commis par ceux qui détiennent le pouvoir politique ou économique. « Les mouvements climat sont pour la xième fois traduits en justice, alors que les entreprises qui rendent littéralement impossible la vie sur Terre voient leurs intérêts protégés par les pouvoirs publics », déplore un militant.[10]

Notre jeune interlocutrice Cynthia apporte ici un point de vue à la fois plus politique et plus amer[11] :

La justice fait partie du système néolibéral et elle est le bras armé de l’Etat. En matière d’urgence climatique, je ne l’ai jamais vue à la hauteur de la situation. La seule fois où j’ai été assistée à une partie d’un procès, il y avait 6 personnes assises, dont une mineure, tous et toutes de moins de 30 ans. Que ce soit le procureur ou le juge, les deux ont fait preuve de paternalisme, de condescendance, en essayant d’acculer les prévenu-es par tous les moyens, notamment avec des questions qui n’avaient aucun rapport avec leurs actions. Ils ne manifestaient aucun respect ou humanité, mais plutôt une volonté d’écraser les prévenu-e-s.

*

La réaction du pouvoir politique

S’il apparaît que les préoccupations de la justice sont très éloignées de celles des collectifs militants, le fossé est encore bien plus profond entre ces derniers et les élu.es. Les juges eux-mêmes semblent dépassés par la violence des réactions sur le plan politique. Le cas le plus extrême est celui des jeunes qui ont lancé un appel à boycotter l’armée : le cas est remonté jusqu’au Conseil fédéral et au Tribunal pénal de Bellinzone (nous y revenons plus en détail au chapitre suivant). Mais même les activistes manifestement non-violents suscitent une réprobation viscérale qui débouche sur des propositions de lois. A Berne, le Conseiller national Mike Egger a par exemple déposé une motion visant à compléter le Code pénal « par une disposition prévoyant que tout blocage de la circulation provoqué intentionnellement puisse être puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire ». Il considère en effet que « celui qui se colle dans la rue doit être traité comme un terroriste ». Du côté de l’UDC, on estime en effet que l’on assiste « aux prémisses de choses plus graves » car « l’extrémisme des activistes consiste à affirmer que leur idéologie est prépondérante, tout comme les djihadistes ».[12] Le texte de la motion a été déposé en septembre 2023 et n’a pas encore été débattu.  

Le discours est à peu près le même pour les députés UDC aux Grands Conseils vaudois et Neuchâtelois. Que ce soit par une interpellation urgente ou par le vote d’une résolution, il est demandé à l’Etat de prendre des mesures urgentes et fortes pour lutter contre le « terrorisme climatique » ou l’« écoterrorisme ». Les saccages infligés notamment aux terrains de golf sont considérés comme « une attaque portée à l’Etat de droit ». Les commentaires sont encore plus virulents du côté du Conseiller national PLR Philippe Nantermod qui se répand dans la presse et dans les débats télévisés pour attaquer avec hargne ces collectifs « autoproclamés représentants d’une terre qui ne leur a rien demandé ». Lui aussi fustige les activistes au nom de son propre combat pour l’environnement : vantant les inventions technologiques pour faire face au réchauffement, il déplore que « ces écolos à la petite semaine démolissent tout ce qui protège l’environnement ».[13]

De façon générale, des représentants de tous les partis se montrent sévères à des degrés divers, à l’encontre des activistes. Par exemple, les actions de blocage de Renovate Switzerland provoquent la réprobation quasi générale, alors que depuis octobre 2022 elles visent un but concret : offrir une formation pour la rénovation des bâtiments en débloquant 4 milliards de francs. Curieuse de connaître l’accueil des parlementaires fédéraux à cette requête, la RTS les a interrogés : sont-ils prêts à porter la demande au Conseil fédéral ? Résultat : « Tous les élus que nous avons contactés reconnaissent une pénurie réelle de main-d’œuvre pour faire face au défi de la rénovation énergétique, mais aucun ne soutient la solution des activistes climatiques en tant que telle ». Deux élues centristes se sont même montrées plus sévères : « Nous avons besoin de mains, et pas de mains collées », a répondu l’une, tandis que l’autre décrétait : « Je pense que les activistes devraient urgemment se reconvertir pour pouvoir œuvrer eux-mêmes à la rénovation des bâtiments ».

*

Les effets de la répression sur les mouvements activistes

Comment les collectifs qui pratiquent la désobéissance civile ressentent-ils les menaces que la dureté de la répression fait planer sur eux ? Pour l’heure, les réactions semblent assez contrastées quel que soit le verdict : si les prévenus sont acquittés ou n’ont que des peines légères, il n’est pas rare qu’ils affirment que cela les encourage à poursuivre leurs actions. Paradoxalement, il peut en aller de même si la peine est lourde ! Elle peut faire de certains condamnés des enragés décidés à faire plus fort encore. A vrai dire, la pandémie de Covid-19 semble avoir joué un rôle aussi important, sinon plus, que la répression pour un retour au calme des militants. La plupart des observateurs, cependant, estiment que la répression a cassé le mouvement. C’est notamment l’avis de Clémence Demay, qui considère que « Les mesures de répression policière, les ordonnances pénales et les procès ont un effet dissuasif sur les militant.es : les gens craignent de participer à des actions de protestation ».[14]

Cynthia, notre jeune interlocutrice va dans le même sens.

Actuellement, la répression brise le mouvement. Elle brise le lien social qui s’y est créé, elle brise les espoirs et elle brise la jeunesse. Ce n’est pas mon cas, mais je ressens ça très fort. La volonté politique de museler certains mouvements porteurs d’espoirs joue aussi un rôle. On est dans une situation d’urgence à cause d’un dérèglement climatique inconnu jusqu’ici. A partir de là, je comprends que les personnes qui veulent passer à la vitesse supérieure envisagent la violence comme moyen d’action. Déjà il y a trois ans, quand on a commencé les manifestations, l’action non-violente était un sujet de discussion. Il y avait des groupes qui se demandaient s’il ne faudrait pas envisager des sabotages ou des actions violentes. C’est une réponse à la violence du système, un système qui nous écrase. [15]

Sur le plan international, XR a annoncé que le mouvement renonçait à ses actions de blocages de routes. Il semble qu’il en va de même pour les groupes suisses si l’on en croit le périodique « Moins ! »[16] : « Nous pensons qu’il n’est plus temps de bloquer des routes en s’y collant les mains, fâchant par ces actions les automobilistes dont certains, contraints par le système actuel, dépendent de leur automobile pour survivre. Il est plutôt temps d’attaquer et de bloquer les principaux responsables et les grandes entreprises qui ravagent nos vies et la planète ». D’autres militants expriment leur frustration : « Depuis 2018, une génération entière a pris la mesure de la catastrophe environnementale actuelle. Des milliers de militant.e.s sont descendu.e.s dans la rue chaque mois pour alerter les institutions du désastre climatique (…) Une lutte qui n’a trouvé aucun écho sérieux au sein de la classe politique ».[17]

*

L’impact sur l’opinion publique

Malgré les commentaires acerbes des élus et les insultes d’automobilistes bloqués sur une autoroute, des enquêtes montrent que le public n’est pas aussi hostile qu’il y paraît. Il peut même se montrer réceptif, sinon à l’action elle-même, du moins à la problématique qu’elle voulait mettre en évidence. Selon les observateurs, la nécessité de rénover les bâtiments, par exemple, n’était pas totalement absente de la conscience publique, mais les activistes ont réussi à la mettre en évidence. L’action qui a suscité le plus d’adhésion fut sans conteste celle des « joueurs de tennis » du Crédit suisse.  De plus, l’appel adressé avec succès à Roger Federer afin qu’il influence « sa » banque dans le choix de ses investissements a réussi comme personne d’autre à mettre cette question à l’agenda politique et médiatique.

Il n’en reste pas moins que l’agacement ou l’ambivalence de la population restent importants, comme l’illustre notre interlocutrice, la professeure Camille Perrier Depeursinge.[18]

La désobéissance civile non violente, ça dérange les gens, ça les interpelle et ils peuvent y adhérer. La partie de tennis, moi j’y adhère complètement : c’était génial. C’était bon enfant. Je pense qu’il y a beaucoup de gens qui ont senti un peu leur sensibilité touchée. Ce qui me dérange dans les actions de désobéissance, comme la soupe sur les œuvres d’art ou les bouchons créés sur la route, c’est quelles  braquent la population, qui se retourne contre les manifestants. Et cela dessert la cause.            

Ce qui m’a vraiment gênée, c’est que le juge Colelough a acquitté les joueurs de tennis et que le lendemain des militants climatiques sont allés répandre du charbon devant le Crédit suisse. Ça donnait vraiment le sentiment que du moment qu’on leur avait laissé la bride sur le cou ils faisaient encore pire !

*

Poursuivre ou non la lutte et comment ?

Le changement de cap annoncé par XR, évoqué plus haut au sujet de son renoncement aux actions de désobéissance civile, n’est pas un avis de dissolution pure et simple. Selon le Temps[19], « Cela signifie moins d’actions qui visent le public, mais davantage qui visent le pouvoir politique ». Selon l’organisation, « Le but, en perturbant le public était aussi de créer le débat sur la question. Aujourd’hui c’est chose faite. En Suisse et ailleurs nous avons vu une grosse progression de la conscience de l’urgence environnementale dans la population. Le contexte est donc assez mûr pour que notre élan ne cible désormais que le pouvoir central ».

Théo, notre jeune interlocuteur, est sceptique : Est-ce la fin du mouvement ? Je ne sais pas, répond-t-il : [20]

Pour avoir des chances de faire bouger les choses, il faudrait faire des coalitions gigantesques avec des gens qui se font confiance. Mais c’est difficile à cause des infiltrations de la police. Dans les grands mouvements, ne pas se faire confiance, se fermer, c’est très difficile. Il faut donc des mouvements de gens qui sont d’accord, internationalement, pour se battre en faveur de plus d’égalité, ou pour des droits égaux. Cela ne doit pas se passer uniquement à l’échelle d’un pays.

La génération des activistes semble avoir compris que pour obtenir suffisamment d’écho et faire bouger les choses, il faut une pluralité de tactiques et une internationalisation du mouvement. Certains collectifs se félicitent d’avoir incarné avec la jeunesse du pays, dès 2018, une prise de conscience totalement nouvelle en lien avec le dérèglement climatique : « Une génération a compris qu’il faudra une pluralité de tactiques pour obtenir un écho sérieux au sein de la classe politique ».[21] Ils ont sans doute raison, mais en même temps ils semblent ignorer que d’autres générations l’ont fait avant eux, contre la mondialisation, le néolibéralisme, les inégalités ou le colonialisme !

Au terme de ce chapitre, impossible de tirer des conclusions claires et encore moins de prédire comment les choses vont évoluer. Ceux qui considèrent que les partisans de la désobéissance civile sont des terroristes prédisent une radicalisation et une « montée en puissance » des activistes. De manière plus objective et moins alarmiste, le magazine Reporterre[22] estime que « Le temps de la protestation polie est peut-être définitivement révolu. À mesure que la catastrophe climatique se précise et devient de plus en plus palpable, le sabotage revient sur le devant de la scène. Sa pratique gagne en légitimité et se généralise au sein du mouvement écologiste ». Il est tout aussi probable que la justice évolue elle aussi, et pas forcément vers une répression accrue. En effet, si les tribunaux pouvaient encore estimer en 2018 que « l’urgence climatique » ne constituait pas un motif pour invoquer un « état de nécessité », ce n’est plus le cas en 2023. 

C’est ce que prédit notre interlocuteur, l’avocat Raphaël Mahaim : [23]

Dans 10 ans, peut-être que la CEDH va casser toute une série de condamnations, contrairement au TF qui a une ligne super-répressive : le droit, rien que le droit, on juge des infractions et il n’y a pas de danger imminent, etc. C’est aussi la position de l’[ex]procureur général Eric Cottier ! On pourrait avoir toute une série d’acquittements et au final, ce jugement de première instance qui a fait couler beaucoup d’encre [l’acquittement des joueurs de tennis] pourrait être la solution.

L’avocat Olivier Peter, dans la préface qu’il a rédigée pour le livre de photos « Nos rêves sont plus longs que vos nuits »[24] imagine, par anticipation, un avenir favorable aux actions de désobéissance civile : « En réponse à la pluie d’amendes adressées par la police et le service des contraventions, de nombreuses personnes concernées se sont refusées à esquiver le combat judiciaire et beaucoup ont été acquittés ». « Mise à l’épreuve de sa propre légalité, la stratégie offensive de la police et du pouvoir judiciaire paraît s’écrouler comme un château de cartes, alors que les salles du Palais de justice se révèlent une tribune inespérée ».

***

Extraits du Jugement du juge Philippe Colelough, rendu le 13 janvier 2020, acquittant les prévenus qui avaient improvisé une partie de tennis dans le hall du Crédit suisse, sur la base du concept d’« état de nécessité ».

Code pénal suisse, article 17 

 « Quiconque commet un acte punissable pour préserver d’un danger imminent et impossible à détourner autrement un bien juridique lui appartenant ou appartenant à un tiers agit de manière licite s’il sauvegarde ainsi des intérêts prépondérants ».

« S’agissant en premier lieu de l’existence d’un danger, celui-ci réside dans les conséquences du changement climatique. A ce sujet, le Tribunal retient comme particulièrement convaincants et pertinents les divers rapports scientifiques produits par les prévenus et dont l’autorité et le sérieux sont indiscutables »

« Il résulte à l’évidence de l’instruction qu’en raison de l’insuffisance des mesures prises à ce jour en Suisse, qu’elles soient politiques ou économiques, le réchauffement moyen pour notre pays ne va en toute logique non pas diminuer, ni même se stabiliser, mais encore augmenter »

« S’agissant de l’impossibilité de détourner autrement le danger…

Une première hypothèse est celle d’une manifestation sur la voie publique. Une vingtaine d’individus, même grimés, qui se livrent à une partie de tennis caricaturale sur la voie publique, fût-ce sur le trottoir devant le Crédit Suisse, ne serait non seulement non autorisée, mais n’aurait surtout en aucun cas l’impact sur le public de celui obtenu dans le cas d’espèce.

Une deuxième hypothèse aurait pu consister à s’adresser formellement à la banque pour lui faire part des critiques à son encontre et obtenir en retour des déterminations. Or il résulte de l’instruction que ce moyen de faire a été préalablement employé…

Une troisième hypothèse… est le recours aux moyens politiques

Le Tribunal fédéral a régulièrement invoqué cette voie … Notre haute Cour excluait que l’état de nécessité puisse être retenu [mais ces considérations étaient émises en 2002]. « Les moyens politiques préconisés alors sont désormais inefficaces vu cette urgence. Des parlementaires fédéraux ont régulièrement déposé des interpellations et des motions à l’attention du Conseil fédéral depuis plus de 5 ans sans que le gouvernement réagisse plus concrètement que par des déclarations d’intention inoffensives, voire lénifiantes, contredites pat la réalité financière, scientifique ou politique….

« En conclusion, on doit retenir que le danger était en l’espèce impossible à détourner autrement et que la subsidiarité absolue a ainsi été respectée ». … L’acte incriminé était donc un moyen nécessaire et proportionné à même d’atteindre le but visé.

Le Tribunal retient que toutes les conditions de l’article 17 CP sont remplies et que les prévenus ont dès lors, de par l’état de nécessité réalisé, agi de manière licite.

Anne-Catherine Menétrey-Savary

Notes

[1] Voir en particulier la thèse de Clémence Demay, avocate, qui présente un tableau général des actions et des jugements et des procédures en cours : « Désobéissance civile et procès climatiques en Suisse – quels combats se jouent devant les tribunaux suisses ? », mai 2023.

[2]Propos recueillis par Infoprisons le 12.07.22

3Propos recueillis par Infoprisons le 19.09.22

[4] Le Temps ; 20.07.23

[5] Le Courrier ; 01.02.22

[6] Irène Wettstein, interrogée par Infoprisons le 09.08.22

[7] Citée par Le Temps ; 20.07.23.

[8] Etat de nécessité : Code pénal, Art. 17 : Quiconque commet un acte punissable pour préserver d’un danger imminent et impossible à détourner autrement un bien juridique lui appartenant ou appartenant à un tiers agit de manière licite s’il sauvegarde ainsi des intérêts prépondérants.

[9] Professeure associée au Centre de droit pénal de la Faculté de droit, des sciences criminelles et d’administration publique de l’Université de Lausanne. Propos recueillis par Infoprisons, le 03.11 22

[10] Le Courrier, 09.05.23

[11] Propos recueillis par Infoprisons le 19.09.22

[12]  La Liberté ; Le Courrier ; 12.06.23 ;

[13] https://nantermod.com/blog/

[14] Le Courrier ; 20.07.23

[15] Propos recueillis par Infoprisons le 19.09.22

[16] Moins ! n° 64 ; mai-juin 2023

[17] Le Courrier ; (09.05.23)

[18] Propos recueillis par Infoprisons le 03.11.22

[19] Le Temps ; 04.01.22

[20] Propos recueillis par Infoprisons le 19.09.22

[21] Le Courrier ; 05.06.23

[22] Reporterre ; octobre 2022

[23] Propos recueillis par Infoprisons le 12.07.22

[24] Interphoto ; Editions d’En Bas, 2018