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Recension : brique par brique, mur par mur : une histoire de l’abolitionnisme pénal

Recension : brique par brique, mur par mur : une histoire de l’abolitionnisme pénal

de Joël Charbit, Gwenola Ricordeau et Shaïn Morisse paru chez Lux Éditeur, dans la collection instinct de liberté en 2024, 312 pages. Préface de Catherine Baker

C’est un ouvrage dense et ambitieux que nous proposent un trio d’auteurs. Le but : raconter une histoire de l’abolitionnisme pénal. 

En cinq chapitres, une introduction et une conclusion, ils y parviennent dans l’ensemble avec brio. Les chapitres offrent des encarts permettant de comprendre des enjeux importants de manière synthétique. La pensée exposée est riche, sans tomber dans des complexités rebutantes. 

Il convient ici d’insister sur deux points importants dans le choix du sous-titre. Il s’agit bien là d’une histoire. Il est ainsi reconnu que si le mouvement abolitionniste est global, il ne faut jamais mettre de côté son aspect local (p.257). Cet ouvrage veut donc avant tout attiser la curiosité et inciter à (ré)ouvrir le débat de manière concrète dans les différents pays et régions. Il ne veut pas archiver l’abolitionnisme, en faire un mouvement du passé à étudier, mais bien le documenter au mieux pour le répandre dans l’ici et le maintenant.

Il est question d’abolitionnisme pénal, ce qui est une tendance relativement nouvelle. Il n’a d’abord été question dans de nombreux courants «que» d’abolir les prisons (abolitionnisme carcéral), puis le spectre s’est élargi pour abolir  le système pénal sous sa forme actuelle, allant de la police à la prison en passant par les tribunaux, que l’on tend à confondre avec la justice elle-même. La lecture abolitionniste des auteures va encore plus loin en se voulant intersectionnelle. Elle englobe des problématiques aussi diverses que le racisme (chapitre 4), la psychophobie et l’écologie (p. 207-221). 

La fin de l’ouvrage propose également une sorte de foire aux questions (FAQ) sur près de 20 pages. Une bonne façon de répondre à des questions fréquentes sur l’abolitionnisme, qui tend à faire peur car il veut rompre avec nos imaginaires remplis de système pénal. Or, il est toujours  angoissant et difficile de sortir de ses habitudes, surtout lorsqu’il s’agit de conceptualiser quelque chose d’aussi essentiel que la justice. 

Cet ouvrage est assurément un bon moyen de poser des bases de discussion autour de l’abolitionnisme, afin de permettre d’ouvrir nos imaginaires et ainsi de trouver ensemble comment abolir le système pénal, qui est bien souvent trop dur envers toutes les parties impliquées et qui ne parvient pas à réinsérer ni à prévenir la récidive de manière convaincante. 

David Kneubühler